« Le surf est une sorte de philosophie stoïque, c’est accepter de n’avoir aucun pouvoir sur les choses ».
Une des caractéristiques magiques du surf est son lien spirituel avec la nature. Si le surf est un sport extrême, il consiste surtout en l’art doux d’attendre. A l’origine à Hawaii, le surf était une activité spirituelle, il célébrait Lonos, le dieu de la fertilité. Le « Soul Surfer » suit l’état d’esprit originel de communion avec la Nature. Le surfeur va contempler le moment, oublier le passé et ne pas se soucier de l’avenir. Tout ce qui importe est l’océan le vent, les courants, la qualité des vagues. Le plaisir du surf, le positionnement au line-up, le partage, la magie des manœuvres en rythme avec le tempo de la vague.
Sur ce thème, Surfing Vox vous propose ces quelques réflexions d’une observatrice attentive de la tribu des surfeurs.
Savez-vous ce qu’est le SPRINZ ? Non, ce n’est pas le dernier cocktail à la mode !… mais le Sports Performance Research Institute New Zealand.
Plus du quart temps à l’eau passé à attendre
D’après cette noble institution, les surfeurs passeraient plus du quart de leur temps à l’eau (28% très exactement) à… attendre les vagues.
Pour les curieux, le temps restant se répartit en : 54% à ramer et revenir au pic et seulement… 8% à surfer. Inutile de préciser que le plaisir tiré de chacune de ces activités est inversement proportionnel à ces statistiques.
Mais au-delà des chiffres, qui ne s’est jamais interrogé sur ce qui occupe l’esprit des surfeurs pendant qu’ils font le bouchon, à califourchon sur leur planche ? Si l’on pressent, que scruter l’horizon, se laisser bercer par la marée, se mettre à l’écoute de ses sensations, est propice à la méditation, est-ce vraiment à cela que les surfeurs se consacrent pendant l’attente du swell ?
Une oisiveté qui interroge
En tant que « groupie » de surfeur, j’ai personnellement été longtemps interloquée par le temps qui peut s’écouler entre deux vagues : plus de 10, 15, 30 minutes, parfois plus… en fonction de la période, la marée, le vent, les bancs. Vu du sable : autant dire une éternité ! Surtout quand vous attendez derrière l’objectif, prête à capter la vague du siècle. Ou du moins de quoi répondre à la fameuse question :
– « Alors, comment tu m’as trouvé ? »
– « Ben…. »
Comment avouer qu’on a décroché avant le take-off ?
Alors, oui, comment ne pas s’interroger : mais que font-ils pendant tout ce temps?
Quand les quelques propos rituels se tarissent, la ribambelle de surfeurs au large communie-t-elle de concert avec les éléments, habitée des mêmes pensées? Ou chacun, laisse-t-il son esprit vagabonder au gré de ses préoccupations du moment ?
Un temps propice à la méditation, l’introspection …
Est-ce l’occasion de faire le vide ou au contraire le plein (d’énergie, de good vibes d’optimisme) ? De convoquer l’esprit de ses chers disparus? De penser à la dernière dispute avec sa moitié et de relativiser les raisons pour lesquelles on s’est laissé emporter ? De refaire le film de la semaine écoulée? De trouver l’idée de génie après laquelle on court depuis de trop longues journées ? D’apprécier le silence, se mettre à l’écoute de soi-même, se « recentrer » comme disent les yogis ? De faire le point sur son état mental et physique ?
… la réflexion, la prise de recul ?
Ou encore : certains refont-ils le monde pendant qu’ils attendent LA bombe? S’interrogent-ils sur le bien fondé du capitalisme, de la course à la consommation, quand cette session est là pour leur prouver que le plus grand dénuement les comble pleinement ?
Se retournent-ils plus modestement sur le chemin parcouru pour arriver jusqu’à cette plage ? Sur la vie qu’ils se sont choisie et qui les a mené à pouvoir profiter pleinement de cette session, pendant que beaucoup ne font face qu’à leur écran d’ordinateur ou à des clients mécontents ?
Ralentir le temps
Une chose est sûre, il y a probablement autant de réponses que la communauté des surfeurs compte d’âmes.
Mais d’après Surfing Vox, l’une des meilleures occupations à proximité du line-up, est sans aucun doute la Contemplation. Une activité, qu’il devient très difficile de pratiquer dans nos quotidiens pressés. L’une des rares activités qui nous permette de ralentir Chronos : un luxe que nous n’avons plus, hors épisode pandémique exceptionnel empêchant la planète de continuer de tourner en rond.
Haïku du line-up.
Perdus dans le bleu
Comme des oiseaux sur le fil
Au large ils oscillent
Attendant la houle
Chapelet en flottaison
Là où nait l’écume
(…) to be continued
Et si vous consacriez les 28% de votre prochaine session à composer les strophes suivantes ? Surfing Vox vous publiera, poète de l’onde.
Et vous à quoi pensez-vous en attendant la vague ? N’hésitez pas à le partager en commentaire.
Et n’hésitez pas non plus à avouer que vous rêvez plutôt à l’after : une « Coldie » post session avec les potes!