Dans les années 70 et 80, le point de rassemblement des surfeurs est le parking des Estagnots. Le nombre croissant de véhicules et de surfeurs dormant sur place vont entrainer l’interdiction de camper sur place.
La retraite va s’effectuer dans la forêt sous les pins.
Dans les années 90, à l’image de Robin des Bois, un surfeur gallois Carwyn Williams va être à l’initiative du campement forestier.
Carwyn, surfeur pro vainqueur du circuit pro européen EPSA en 85 et 86. Il surfe par passion et participe aux compétitions par nécessité pour pouvoir voyager et subvenir à ses besoins. En 1988, il bat le champion du monde Damien Hardman au Rip Curl Pro Hossegor. En plein essor professionnel, il est victime d’un grave accident de la route près de Bordeaux qui met un stop à sa carrière pro. Avec une grave blessure à la jambe, iI vit une période de déprime. La joie de vivre de son chien Taffy l’aide à tenir le coup et Carwyn revient progressivement au surf de compétition. (Reportage BBC.co.uk.Legends of Welsch Sport)
Une aire de pique-nique dans la forêt du côté du Penon est ainsi reconvertie en surf camp.
La Pinède, premier surf camp français où les vans n’ont pas tardé à se regrouper. Carwyn ,toujours premier arrivé pour la saison des vagues, bénéficie du meilleur emplacement.
La communauté de la forêt repose sur un partage des valeurs et la bonne volonté.
Les principes sont basiques, la gratuité, le surf et la fiesta au vin rouge. Pas vraiment de frigo pour les bières fraiches donc conversion des anglo-australiens au rouge !
Des planches de surf partout avec les combi suspendues dans les arbres. Une table de ping-pong améliore la convivialité. Une ambiance assez hippie, une existence paisible rythmée par les vagues et la qualité des bancs de sable.
Un Brésilien a construit un four à pain dans sa camionnette et fournit du pain frais à la communauté.
Une équipe de marseillais alimente le trafic illicite.
Parfois plus de 50 camionnettes campent sur place. Par chance pour la communauté, un mécano répare tout et n’importe quoi notamment les combi WV.
Un certain Robert (Robber pour les anglais) fait les courses au supermarché. En réalité il fraude et revend les produits à moitié prix aux surfeurs.
Le lieu éveille la curiosité et quelques pro sont venus faire un tour pour l’ambiance notamment Tom Curren. Un soir, il pleuvait à verse, ça pissait dur et on entendait Tom casser des bûches dans le noir. Il est revenu en disant: « je fais du feu pour arréter la pluie. »
Wayne Lynch qui shape pour Euroglass aime bien venir. Belly le cherchait pour faire un stock de planches et Wayne se planquait dans le camp . D’autres pro curieux comme Brad Gerlach et Donovan Frankenreiter sont venus tester le lieu après une soirée au Rock Food.
Un jour ,tout d’un coup, des gars sont arrivés et ont commencé à construire des douches et des toilettes. Il y a une vieille loi en France datant de l’époque Napoléonienne selon laquelle l’administration doit fournir de l’eau courante pour les voyageurs qui séjournent plus de trois mois dans un même lieu. Au début c’était incroyable, tellement agréable et chacun essayait de garder la propreté. Mais progressivement cela c’est dégradé , les chiottes ont commencé à puer et quelque part c’était comme le début de la fin.
La police locale venait parfois boire un café et discuter avec les surfeurs. Le campement a perduré pendant quelques années avant l’arrivée du mouvement techno.
Là c’est devenu moche. Un magazine de scène rave, de musique underground a fait un article et tout s’est transformé en une fête folle avec des hauts parleurs énormes. Les nouveaux venus étaient aggressifs, ne surfaient pas et c’est devenu la merde. Pour finir les policiers en tenue anti-émeute sont intervenus pour évacuer tout le monde.
Fin de l’histoire. Loin des routes il existait une géographie de traverse . Une forêt protégée du vacarme, épargnée par l’aménagement qui est la pollution du mystère.
Extrait de Stab Mag. par Paul Evans.