Surfeuse en Solo

Au sortir de l’excitation et des agapes des fêtes, que diriez-vous de mettre à profit le début d’année pour planifier votre prochain surf-trip ? De quoi égayer ce milieu d’hiver et se fixer un nouvel horizon radieux. Pour vous donner quelques idées et tuyaux, Surfing Vox a demandé à deux surfeuses françaises, l’artiste Stéphanie Leblanc Hervy et la sportive de haut-niveau étudiante en Sciences-po, Marie Chauché, de partager les souvenirs de leur meilleur surf trip en solo. Merci à elles de s’être prêtées au jeu du questionnaire. Et comme il n’y a pas plus éloquent qu’une surfeuse passionnée, nous leur laissons la parole.

Stéphanie : – Mon meilleur surf trip en solo était les Maldives en 2005 mais en fait, sur place je n’étais pas en solo. Je suis partie seule mais pour les Maldives je suis passé par une compagnie qui organise des voyages surf (Abandosurf). Une semaine en bateau et une semaine à lohifushi. On était 9 avec un photographe.

surf trip girl
Stéphanie Leblanc Hervy

Marie : – Je n’ai pas eu beaucoup d’occasions de voyager seule. J’ai cependant passé un an à Ténérife, dans le cadre d’un échange universitaire, au cours duquel j’ai arpenté l’île en bus à la recherche de vagues. J’avais 19 ans, c’était ma deuxième année d’étude. C’était une expérience très enrichissante. En fait de « surf trip en solo », j’ai constamment rencontré du monde ! Qu’il s’agisse des locaux ou d’autres voyageurs. J’avais quelques contacts sur place qui sont rapidement devenus des amis. Et puis, très vite, j’ai rencontré d’autres surfeurs qui m’ont fait découvrir les spots de l’île, parfois même hébergé ou véhiculé.

Marie Chauché | photographe Éric Chauche

Les rares moments où je me suis retrouvée seule, c’est dans les transports en commun, car je n’avais pas de voiture et j’étais trop jeune pour pouvoir en louer une à un prix décent. Je logeais dans le Nord de l’île.  J’étais à environ 45 minutes du spot le plus proche.  Il y avait trois heures de bus (aller) pour rejoindre les spots du Sud. Le temps de trajet était donc au minimum doublé, mais c’était le prix à payer pour découvrir des endroits dans lesquels je ne serais probablement jamais allée. J’ai pu aussi admirer les paysages (chose qu’on ne peut pas faire en conduisant), et éprouver ma motivation.

Je pense que voyager seule m’a permis d’être plus ouverte à la rencontre mais aussi plus flexible. Mon emploi du temps universitaire était ma seule contrainte et je n’avais pas à en prendre d’autres en compte dans mon organisation. Même si encore une fois, je n’étais jamais vraiment seule puisque je rejoignais souvent des amis pour surfer.

Stéphanie : – Les Maldives sont une bonne destination de vagues en été, j’avais envie de changer, il n’y avait pas encore trop de monde et ce n’était pas hors de prix comme maintenant. Alors, pourquoi pas?

Marie : – Pour le surf ! Dans le cadre de mes études, je devais passer une année dans une université étrangère. J’avais le choix entre de multiples destinations mais l’université de la Laguna s’est vite imposée d’elle-même pour son emplacement … Tenerife est une île très riche que cela soit du point de vue des paysages, du climat, de la diversité culturelle, ou encore de la qualité des vagues. Rien que sur l’île, il y a trois massifs montagneux. Les autres îles des Canaries sont assez accessibles une fois sur place. C’était également assez avantageux d’un point de vue géographique : le compromis idéal pour ne pas être trop loin de chez moi pour ce premier voyage seule tout en étant dépaysée.

Stéphanie : – Pour les Maldives, je m’y suis préparée en cherchant des packages avec les offres et les spots de surf. Pour d’autres surf-trips en solo non organisés : je regarde les conditions de surf pour la période où j’envisage de partir. C’est un critère de sélection pour la destination. Ensuite je regarde où sont situés les spots. Je cherche les billets d’avion pour voir si c’est une destination abordable. Quand tout cadre, je cherche un logement près d’un spot pas trop éloigné des autres, si possible devant la mer. Sinon il faut avoir au moins un spot accessible à pied. Puis je loue une voiture et c’est parti !
En général je regarde aussi s’il y’a des trucs à voir pas loin ou d’autres activités pour les moments creux.

Marie : – En ce qui concerne le surf, comme à chaque fois que je pars en trip, je repère les spots répertoriés et les conditions nécessaires pour qu’ils fonctionnent, ainsi que leur accès. Cela m’a permis de choisir les planches que j’amènerai. Je n’avais pris que des shortboards pour me forcer à progresser dans cette discipline, plus adaptées à la culture du surf local et aux spots de l’île, mais également pour des raisons pratiques (plus faciles à transporter et à stocker). A l’époque je m’étais un peu renseignée sur les transports en commun, mais j’ai découvert le fonctionnement du réseau sur place. Par chance, ce dernier est très développé à Tenerife. J’avais préalablement échangé avec quelques surfeurs dont on m’avait donné le contact, qui avaient gentiment répondu à mes doutes, et je les avais prévenus de mon arrivée. Concernant la vie quotidienne, étant donné que je partais pour l’année, j’avais préalablement trouvé une colocation à proximité de l’université.

Marie Chauché | photographe Éric Chauche

Stéphanie : – Je n’ai pas un meilleur souvenir mais pleins ! J’ai rencontré des personnes qui sont encore mes amis, j’ai surfé dans des conditions incroyables, dans des paysages magnifiques. Mais c’est avant tout les gens que j’ai rencontrés, qui ont fait de cette expérience quelque chose d’encore plus spécial.

Stéphanie : – La pire galère a été le retour avec le coup d’Etat à Malé.  Du coup on a dû aller à Colombo [Sri Lanka, NDLR]. Et comme une galère n’arrive jamais seule : cela a enchaîné avec le retard du deuxième avion à Londres. Les planches n’étaient pas l’arrivée à Madrid et après les déclarations de perte etc., il restait encore à faire la route jusqu’à Barcelone. Hyper long…

Marie : – Il ne m’est pas arrivé beaucoup de galère. Au début, ce n’était pas évident car je n’avais pas de forfait mobile, donc pas de GPS. Je découvrais tout juste le fonctionnement du réseau de bus mais je ne connaissais pas les lignes et je parlais mal l’espagnol. Je me suis perdue plusieurs fois mais les Tinerfeños sont toujours venus à mon secours.

Mais ma pire galère a sans doute été mon retour, en plein Covid et plein confinement. J’ai cru que je ne rentrerais jamais et pour la première fois j’ai compris ce que signifiait l’isolement que peuvent ressentir certains insulaires. Pendant une semaine tous mes vols ont été successivement annulés. Je commençais vraiment à perdre espoir de rentrer passer le confinement avec ma famille. Le suspense a duré jusqu’à l’embarquement, quand la compagnie aérienne nous annonça que tout le monde ne pourrait pas embarquer. Finalement, face à la panique générale ils firent le choix de tous nous faire monter au détriment sans doute des consignes sanitaires.

Stéphanie : – Oui bien sûr, comme je recommanderais les expériences de surf en solo total. Mais tout dépend de l’état d’esprit dans lequel on se trouve et du type de voyage. Il m’est arrivé de faire des trips en solo… et de me sentir très seule, à la limite de l’ennui. Dans d’autres cas, au contraire, cela m’a permis de me reconnecter à moi-même. Dans d’autres encore, j’ai fait de belles rencontres. Chaque voyage est un apprentissage, bien plus qu’un surf trip en somme.

Marie : – Complètement. Je pense que cette expérience oblige de sortir de sa zone de confort. Dans un premier temps, on ne peut compter que sur soi-même. On découvre alors que l’on détient des ressources insoupçonnées et que l’on est capable de bien plus que ce que l’on aurait imaginé.

Marie Chauché | photographe Éric Chauche

Stéphanie : – Le conseil que je donnerais est savoir de quoi on a envie ou besoin avant d’organiser son voyage. Une fois sur place, prendre les choses comme elles viennent, même si ce n’est pas ce qu’on avait prévu ou attendu…
Ah oui et prévoir une bonne trousse à pharmacie !

Stéphanie Leblanc Hervy

Marie : – Il est bien sûr important d’organiser un minimum le voyage et d’anticiper les galères potentielles pour partir sereinement. Même si l’on décide de partir seule, il peut être rassurant d’avoir au préalable quelques contacts sur place. Cela permet non seulement de lancer le voyage mais également de pouvoir compter sur quelqu’un en cas de pépin ou encore de pouvoir échanger avec les locaux avant de partir pour avoir quelques renseignements « de terrain ».

Stéphanie : – Fuerteventura début janvier.

Marie : – Revenir au top de ma forme après une récente opération de la cheville.

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Alors : vous n’avez pas encore choisi votre future destination ? Ne tardez pas ! Mais surtout souvenez-vous que d’après l’un de nos plus emblématiques écrivains : Le seul véritable voyage, le seul bain de Jouvence, ce ne serait pas d’aller vers de nouveaux paysages, mais d’avoir d’autres yeux, de voir l’univers avec les yeux d’un autre, de cent autres, de voir les cent univers que chacun d’eux voit, que chacun d’eux est…[1].

Pour aller plus loin :

Retrouvez le parcours de Stéphanie sur son site : https://slh-fineart.com/leblanc-hervy/

Et retrouvez Marie sur Insta : https://www.instagram.com/mariechauchee/?hl=fr


[1] PROUST, Marcel. La Prisonnière, tome 2, djvu/71

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